Je ne connais pas une personne ou un magazine qui n’ait pas trouvé le premier opus du film Mesrine (prononcer Mérineu) extraordinaire et renversant.
Et bien moi, Mérineu, je suis contre. Et il serait trop aisé de résumer le problème au mauvais vin bu la veille et qui tapait dans ma tête à cette séance du matin où j’ai vécu l’enfer. Si mes arguments t’intéressent, continue. Sinon, passe ton chemin, pied-tendre.
1- La performance d’acteur
Evidemment, le jeu physique de Cassel claque : ses grosses poches de gros pochard sous les yeux, ses mouvements de menton, sa façon de plier son corps à gogo (hop plié, hop déplié, hop dans la cellule, hop dans la voiture, hop fais-gaffe-je-sors-mon-flingue-là…).
D’accord, c’est épatant quand les performances physiques servent des enjeux dramatiques. Et d’accord, ça change du jeu d’acteur à la Krank (visuel ci-joint) de la plupart de nos acteurs français. Mais ça ne fait pas tout. Prenons un exemple. Si tu es un peu honnête, tu avoueras que bien qu’impressionné(e) par sa spectaculaire transformation en mamie bossue et toxicomane, tu n’as pas pu supporter Marion Cotillard plus de 13 minutes dans sa version de La Môme Piaf. Et bien voilà: Marion-Vincent, même combat.
2- L’ode au bouffon
Que Cassel s’agite, ça ne me dérange pas tant que ça, tu sais, d’autant que l’acteur est plutôt du genre pas vilain à regarder. Pour tout te dire, mon vrai problème est que je ne comprends pas l’intérêt d’avoir tressé une couronne panégyrique à un homme qui était le prototype même du sale type. Traître, ultra-violent, sans autre valeur que la satisfaction de ses pulsions capricieuses, Mesrine est le mec qui ne méritait rien d’autre qu’une "paire de baffes et au dodo".
Alors, que ceux qui ont vécu sa cavale en direct aient envie de se coller de petits frissons en se repassant l’histoire de l’ennemi public numéro 1, je peux le comprendre. Mais l’intérêt des générations suivantes pour ce gars pathétique est, à mes yeux, du même ordre que la fascination morbide qui draine les foules vers les films d’horreur ou… le Kentucky Fried Chicken.
3- «Le mec qui l’en a»
Pendant que j’écris, une question se lève. Et si tout cet intérêt et cet enthousiasme pour le gangster-braqueur ne reposait que sur sa quantité de testostérone? Mesrine, impossible de le nier, c’est le mec qui en a. Et des sévères avec ça. Il dit à son papa "Mais obligatoire ça existe pas-euh!!!". Il prend d’assaut une prison avec un couteau suisse. Il fait le beau devant des parrains de la pègre. Et il dit même "On me tue pas avant que j’ai décidé! D'abord!".
D’accord Mérineu, calme toi. C’est bien d’être ultra-courageux, voire complètement inconscient. Et ça change du mou-du-genou quotidien.
Mais tu sais, comme le résumait bien Audiard, "Les cons ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît"
Tu me rassures !! Je croyais être le seul à avoir vécu un calvaire pendant 1h56...
Rédigé par : Guillaume | 28 octobre 2008 à 19:49
Euh on a le droit de ne pas être d'accord ?
Sur le point 1 je suis quasi en osmose avec toi chère Alex. Effectivement le jeu d'acteur ne fait pas tout. Et contrairement à toi, je pense que la Môme, film navrant de lenteur, de « glauquitude » est sauvé par la performance de Marion Cotillard. Mais ce film est un autre débat.
Revenons à ce cher Vincent Cassel en mettant de côté sa testostérone débordante qui pourrait challenger mon objectivité de femelle aux abois. Il est incontestable que cet homme a du talent, et que le film peut reposer tranquillement sur son jeu d'acteur hors pair. Ca oui, il est doué pour jouer les ignobles personnages. Petit hommage à Depardieu qui pour une fois, n’était pas trop mauvais. Ca change.
Le point qui soulève mon désaccord, que dis-je mon indignation (moi aussi je t'aime tu sais) est le second. On ne peut pas prétendre ne pas connaître l'histoire avant d'aller voir ce film (oui je sais sauf toi, mais la majorité de ceux qui l’ont vu, savait elle).
Et donc, une fois passé le guichet du cinéma, on sait que nous allons voir l'histoire d'un affreux personnage, violent, narcissique c'est certain, fou je n'en doute pas non plus. Mais ce n'est pas tant ses prouesses de sale type qui sont présentées sur grand écran mais le profil psychologique d'un homme dans toute sa complexité qui nous conduit à nous demander comment ce bandit est devenu si célèbre.
Je pense que le public n'est pas dupe et n'en perd pas son sens critique. Qui était Mesrine ? Quel type d’homme, tout aussi dangereux et violent soit-il peut être aimé de tant de femmes ? Car il l’a été, aimé, aussi curieux que cela puisse paraître. Mais l'attrait que nous avons pour ces odieux personnages n'est pas né d'hier, et je pense que Mesrine n'en sort pas plus grandi qu'un autre.
On ne compte plus les monstres fascinants dont l’histoire a été utilisée à des fins artistiques et/ou financières, au cinéma, dans les livres. Ce n’est pas pour autant que nous cautionnons leurs atrocités. Mais ils fascinent car ils échappent à tout équilibre, toute raison, ils ne fonctionnent pas comme « nous, les gens normaux ». On s’interroge sur ce qui peut se passer dans la tête de ces gens. Victor Hugo en a fait un livre magnifique « Le dernier jour d’un condamné », qui nous conduit à nous interroger sur le profil psychologique des criminels. Donc pour résumer, autant faire comme ma chère belle-maman qui m’a dit « Ah non moi je n’irai pas voir Mesrine au cinéma. Avec les droits d’auteur, ses enfants vont s’en mettre plein les poches et tout ça au nom de quoi ? ». Au moins elle sait ce qu’elle veut et surtout ce qu’elle ne veut pas !
Troisième point. Oui Mesrine était un con. Mais pas un idiot. Quelqu’un de certainement intelligent même. Mais ça n’enlève en rien le caractère incroyable de son histoire, lui un homme ordinaire qui a choisi de vivre une vie de dingue (tout à fait contestable au nom des valeurs de notre société), de son culot, qui nous entraîne dans un film plein d’actions, sans lenteur.
Ce qui nous conduit à nous demander ce qu’est un bon film : c’est tout en même temps. Un bon jeu d’acteurs, une intrigue bien ficelée, du rythme, des images, des personnages complets et complexes, des couleurs, de la musique. Après tout est question de critères et dépend de ce que chacun recherche : de l’évasion ou de la réflexion, ou les deux. Moi j’ai été servie.
Rédigé par : Valentine | 29 octobre 2008 à 10:29
Ma Valounette bien aimée,
Je crois que le flambeau d'oestrogènes que Vincent Cassel a allumé en toi t'a fait perdre tout discernement. Et que...
Evidemment non, c'eut été trop facile. Je ne m'engagerai pas sur le chemin d'une mauvaise foi que tu sauras aisément débusquer et débouter en quelques lignes.
Ainsi, vois dans le discours qui suit le signe de toute ma sincérité, et de mon indéfectible affection.
Je te l'ai dit : je ne savais pas que Mesrine (l'homme) était une grosse tâche monstrueuse. Naïvement, je pensais qu'il était une sorte de gangster-Robin des Bois. Un type qui a choisi le banditisme pour protester contre le système.
Certes, je n'avais rien compris. Mais à ma décharge, aucun critique de cinéma n'était venu me détromper.
J'ai donc été assez surprise et gênée de constater que Mesrine (le film) tressait les louanges d'un gars odieux.
Car OUI, Valentine Bardin, l'art est pour moi D'ABORD une question de valeurs. Et je ne cautionne pas qu'on l'utilise (en peinture, en cinéma ou en littérature) pour défendre la monstruosité, la violence ou... le Kentuchy Fried Chicken. Et ce ne sont pas là des valeurs sociétales que je défends (comme tu l'insinues, traîtresse), mais simplement des valeurs humaines.
C'est d'ailleurs à cause de ce même intégrisme fleur bleue que je n'ai pas pu mettre un pied dans le corner des Frères Chapman à la FIAC, partisan d'une création malsaine et sinistre (j'te calme là, non?).
Maintenant ce positionnement ne me poussera jamais à "punir" les héritiers de Mesrine pour les méfaits commis par leur père, et même, je trouve l'argument de ta belle-maman vraiment mesquin (mais comment a fait Cédric?).
Simplement, je me contenterai de me renseigner mieux la prochaine fois et de ne pas aller voir le film. "Si j'aurais su, j'aurais pas venu" comme on dit. Ca nous évitera du même coup de nous friter pendant des heures via les commentaires de ce blog, et de prendre ainsi le risque de couler RPCA par tant d'improductivité.
Si tu veux tout savoir, pour moi "un bon film c'est un bon jeu d’acteurs, une intrigue bien ficelée, du rythme, des images, des personnages complets et complexes, des couleurs, de la musique". Mais un bon film, c'est surtout un film qui parle de l'homme, en parlant d'humanisme. Et pas de l'homme comme une coquille vide ne valant pas mieux qu'un chien stupide.
You know what I mean ?
Mais tu sais, quelles que soient nos divergences, j'ai envie de te dire : "Adam a croqué la pomme. L'homo domotique effleurera son touch panel". Et je t'aime.
Rédigé par : Alexandra | 29 octobre 2008 à 11:14
Merci pour m'avoir fait repenser à Krank !
Je ricane doucement depuis...
Anne-So
Rédigé par : AnneSo | 29 octobre 2008 à 11:20
Quelle déclaration d'amuuuuuuuuuuuuur au delà de nos différences irréconciliables ! Moi aussi je t'aime.
Essuyez tous vos larmes, je ne me relancerai pas dans une tirade justifiant mon attrait pour cette coquille vide, pas si vide, à mon humble avis.
Pour la sauvegarde de l'agence RPCA, je retourne à mon boulot. Mais sois rassuré cher lecteur. Une chose très forte nous unit encore avec Alexandra..."Adam a croqué la pomme. L'homo domotique effleurera son touch panel".
Rédigé par : Valentine | 29 octobre 2008 à 11:22
Complètement d'accord, mais alors vraiment quoi!!! (même que moi aussi j'ai fait un article dessus), je ne comprend pas cet engouement pour ce type...
Rédigé par : sardine | 31 octobre 2008 à 10:49